Collectif Urgence Planétaire de Côte d\'Or

Agriculture et souveraineté alimentaire - Européennes 2009

Agriculture et souveraineté alimentaire

      Nous connaissons une crise alimentaire, agricole, financière et économique qui a de graves répercussions sur les petits agriculteurs et sur la gestion des terres agricoles au Sud comme au Nord. Elle a mis en évidence les conséquences désastreuses du soutien à l’agrobusiness au détriment de l’agriculture familiale et paysanne et de décennies de libéralisation de l’agriculture au détriment de la souveraineté alimentaire. L’Union Europénne, à travers ses politiques et les organisations qu’elle influence, joue un rôle central dans cette crise.

 

La crise alimentaire et agricole mondiale

     Les émeutes de la faim dans 40 pays fin 2007 et début 2008 ont attiré l’attention de l’opinion sur une crise alimentaire et agricole devenue visible par le fait que les consommateurs pauvres des villes ont manifesté contre la vie chère. Rappelons que 850 millions de personnes souffraient de la faim en 2007, les trois quarts étant des ruraux. Avec la crise  et à l’heure où les prix agricoles  sont en baisse, l’ONU  estime à près d’un milliard le nombre de personnes souffrant aujourd’hui de la faim.

 

Parmi les principales causes : agro-carburants et spéculation

     Le développement des agro carburants est une des causes de la hausse des prix alimentaires. Les multinationales et les puissances économiques : Etats-Unis, Union Européenne et Brésil, ont développé  la production d’agro carburants. Des subventions et des investissements massifs sont dirigés vers ce secteur. Ainsi, l’usage de la terre a  évolué, passant de la production alimentaire à la production de carburants.

      La spéculation est également une des principales causes  de la hausse des prix . Avec la crise des subprimes, les matières premières  deviennent des valeurs  spéculatives. Des hedge funds (fonds  très risqués et peu ou pas réglementés) auraient aggravé la hausse des prix par leur intervention sur les marchés à terme en achetant de l’or, du pétrole et des produits alimentaires de base. Les spéculateurs misent sur le risque de pénurie et l’augmentation artificielle des prix. La dérégulation, la multiplication des accords de libre-échange sont également source de préoccupation. (Voir document joint)

 

L’accaparement des terres agricoles : un phénomène nouveau et mondial

       La synergie des 2 grandes crises mondiales donne naissance à une tendance consistant à acheter des terres pour « externaliser » la production alimentaire ou d’agro-carburants : l’Arabie Saoudite, le Japon, la Chine, l’Inde, la Corée la Lybie, l’Egypte se sont engagés dans  la recherche de terres agricoles fertiles dans des pays comme l’Ouganda, le Brésil, Madagascar, le Cambodge, le Soudan, le Pakistan. Ces pays acceptent de céder leurs terres contre des offres d’investissements qui conduisent certains à parler de « néo-colonialisme » foncier.

 

Des conséquences dramatiques pour les petits paysans

        La première conséquence est que les paysans et les populations locales vont perdre l’accès aux terres pour une production locale de produits alimentaires. Le fondement même sur lequel doit reposer la souveraineté alimentaire est tout simplement bradé.  Le rachat des terres conduit à une restructuration : les terres rachetées, actuellement des petites exploitations ou des forêts, se transformeront en grandes propriétés agricoles fournissant des grands marchés lointains. C’est donc un modèle d’agriculture exportatrice et industrielle qui est en train de se consolider et qui ne fait qu’ aggraver les causes de la crise alimentaire 2007/08. Les luttes de nombreux mouvements en faveur d’une véritable réforme agraire et des droits des populations autochtones s’opposent à ce néo-colonialisme foncier.

 

L’impact des politiques européennes sur l’accès à la terre

        Depuis plus de 20 ans, la Politique Agricole Commune (PAC), après avoir assuré la souveraineté alimentaire de l’Europe, au lieu de chercher à promouvoir une agriculture destinée à assurer une alimentation de qualité et à préserver l’environnement, encourage le développement des exportations à bas prix. Les conséquences pour les pays du Sud sont graves : dumping sur leurs propres marchés intérieurs, impact social et environnemental des monocultures d’exportation au Sud. Ce modèle peut se résumer à quelques maux : pollution des terres, destruction des forêts, expulsion des populations indigènes et des petits paysans, éviction des cultures vivrières.

         En Europe, la PAC rend difficile l’installation des jeunes agriculteurs et compromet le maintien

des emplois agricoles et l’aménagement durable du territoire. De plus, alors que les actifs agricoles représentent 1/3   de la population  active  des  pays  d’Europe  de l’Est et du Centre, le processus

d’intégration remet en cause l’agriculture paysanne et familiale. L’accaparement des terres touche également ces pays, membres de l’UE, eldorado pour des gros exploitants et les entreprises agro-alimentaires européennes.

 

Réforme de la PAC en 2013

        A l’occasion du bilan de santé de la PAC, Peuples Solidaires et ses partenaires ont demandé une refondation de la PAC respectant la Souveraineté alimentaire au Nord et au Sud. Les ajustements décidés sont d’une grande timidité. Il convient donc dès maintenant de préparer une refondation sur des principes et des outils favorables à l’agriculture paysanne.      

 

Les négociations des Accords de Partenariat Economique Europe/ACP

        Les négociations doivent se poursuivre avec une révision de la finalité des APE  afin de protéger le droit à l’alimentation et servir le développement  des pays concernés : renoncement aux exportations subventionnées, au dumping économique, social et environnemental, à l’abaissement des protections et des revenus douaniers des pays pauvres, aux accords bilatéraux visant à diviser les interlocuteurs. 

 

Régulation des pratiques des entreprises et des institutions internationales

         Face à l’achat de terres agricoles par les entreprises pour la production d’agro carburants, pour l’externalisation  de la sécurité alimentaire ou pour des raisons spéculatives, la question  de la régulation des achats de terres  doit être mise à l’ordre du jour du parlement européen ainsi que les politiques foncières de la Banque Mondiale, de la Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement et de la Banque Européenne d’Investissement.

 

Sécurité alimentaire ou Souveraineté alimentaire, l’U.E doit choisir

         Pour l’U.E. il suffit de libéraliser le commerce des produits agricoles et alimentaires sur toute la planète pour garantir la sécurité alimentaire. Cela permet surtout de vendre les excédents agricoles et les produits agro-alimentaires. Cela induit l’explosion de transports inutiles et polluants.

         Face à cette politique, le concept de souveraineté alimentaire auquel adhèrent les associations qui composent notre collectif répond à la question : qui va produire la nourriture dont la population mondiale a besoin. La souveraineté alimentaire désigne le DROIT des populations, des états ou unions à définir leur politique agricole et alimentaire, sans dumping vis-à-vis  des pays tiers.

       Cela induit :

- priorité à la production locale pour nourrir la population, l’accès des paysans et des sans-terres à la terre, à l’eau, aux semences (avec possibilité du choix sans OGM), au crédit,

- droit des Etats à se protéger des importations à trop bas prix,

- prix agricoles liés aux coûts de production

- participation des populations au choix des politiques agricoles et alimentaires.

 

Ce sont les enjeux agricoles et alimentaires pour le prochain Parlement Européen :

Que peuvent faire les eurodéputés ?

 

Etes-vous prêts à vous engager pour :

  • La refondation de la PAC sur le principe de la souveraineté alimentaire des pays pauvres ?
  • La révision des APE/ACP dans le sens de la souveraineté alimentaire et d’une attitude derespect  du fort vis à vis du faible ?
  • La remise en cause de l’objectif d’introduction de 10% d’agrocarburants dans les carburants européens d’ici 2020 ?
  • La relocalisation de l’agriculture et la diminution des transports consommateurs et polluants ?
  • La réalisation d’études d’impacts sur les investissements fonciers en Europe de l’Est ?
  • Le contrôle des pratiques d’achats fonciers des multinationales agro-alimentaires ?
  • Le contrôle des investissements de la BERD et de la BEI ?
  • La clarification de la position de l’UE vis  à vis de la politique foncière de la Banque Mondiale?
  • Une répartition plus juste des terres au bénéfice des petites et moyennes exploitations et la régulation du marché foncier ?
  • Le maintien du statut du fermage au nom de la conception de la terre, outil de travail ?
  • L’obtention de garanties pour assurer la défense des fermiers.

 

Quelques faits, quelques chiffres

 

     Rappelons que 850 millions de personnes souffraient de la faim en 2007, les trois quarts étant des ruraux. Avec la crise  et à l’heure où les prix agricoles  sont en baisse, l’ONU  estime à près d’un milliard le nombre de personnes souffrant aujourd’hui de la faim.

 

     Par ailleurs les Objectifs du Millénaire pour le Développement prévoyaient en 2000 de réduire de moitié en 2015 la population souffrant de la faim, de deux tiers la mortalité infantile, de généraliser  la scolarisation primaire, de mettre en place un partenariat mondial pour le développement, etc…

En 2005, on prévoyait que l’Afrique atteindrait les objectifs fixés pour 2015 en…2147. Qu’en est-il après ce début de crise mondiale ?

 

     100 millions de tonnes de céréales au moins sont consacrés de nos jours à la production de carburants. Le maïs est la principale céréale, 12% de la production totale, utilisée pour la production d’éthanol. En 2007 23% du maïs américain a été consacré à cette production contre 6% en 2005. De plus, les importations de maïs mexicain ont amené un quasi doublement du prix de la tortilla, aliment de base des mexicains.

 

     Selon la FAO, le déficit alimentaire en Afrique de l’Ouest a augmenté de 81% entre 1995 et 2004. Les importations de céréales ont augmenté de 102%, de sucre de 83%, des produits laitiers de 152% et de volaille de 500%. Or la région a le potentiel pour produire des quantités suffisantes de nourriture. Dans le cadre des Accords de Partenariat Economiques (APE), l’U.E. demande aux pays ACP - et à l’Afrique de l’Ouest notamment- de poursuivre la libéralisation de leur secteur agricole. Les effets dévastateurs sur la production alimentaire sont prévisibles.

 

     L’agronome Marc Dufumier constate : « Il y a deux-cents fois plus de travail dans un riz de Casamance que dans un riz de Floride ou de Camargue. Les mettre en compétition, c’est faire courir un coureur à pied contre une Formule 1, et en plus la F 1 est subventionnée. »

 

     La culture du palmier à huile en Indonésie, en pleine expansion, en vue de la production d’agro-carburants, entraîne l’incendie des forêts humides, la destruction des ressources agricoles des populations autochtones et leur expulsion, la destruction des sols et des cours d’eau par des résidus gras  et chimiques ainsi que par une vingtaine de pesticides et le paraquat, insecticide interdit dans de 

nombreux pays, expose les ouvriers agricoles à des pathologies oculaires et digestives et à des troubles des fonctions reproductives.

 

     La filière soja met en œuvre en Amérique du Sud la monoculture intensive du soja, transgénique ou non, au détriment de la qualité des sols, du droit à la terre des paysans du sud, de la biodiversité et de la survie d’une partie de la forêt primaire amazonienne, pour permettre dans nos pays l’élevage intensif et la surproduction de porc dont le prix de vente rémunère mal nos éleveurs et dont la surconsommation entraîne des maladies cardio-vasculaires.

 

     Au début des années 2000, les exportations européennes de découpes de poulet congelées, de faible qualité et invendables en Europe, ont envahi le Sénégal et le Cameroun à bas prix, apportant une concurrence déloyale au poulet local et ruinant nombre d’élevages familiaux ou d’élevages industriels naissants. Il a fallu une pression conjointe des sociétés civiles en Europe et en Afrique pour que les pays concernés relèvent leurs droits de douane et sauvent ainsi une activité économique assurant pour partie leur souveraineté alimentaire.

 

     La firme sud-coréenne Deawoo s’apprête à louer pour 99 ans 1 million 300000 hectares de terres agricoles à Madagascar pour y cultiver du maïs et des palmiers à huile dont les produits seront destinés à la Corée, et dont les malgaches ne tireront que quelques salaires de misère ?

(Information transmise par l’ONG Peuples Solidaires).



27/12/2011
0 Poster un commentaire

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 10 autres membres